Délégation à l'éducation aux médias et à l'information

CLEMI-Académie de Créteil

3 mai 2011 : Rencontre à l’UNESCO pour la liberté de la presse

04 / 05 / 2011 | Clemi Créteil

Mardi 3 mai 2011, des jeunes se sont retrouvés à l’UNESCO à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse. Avec Ziad Maalouf (RFI), Edwy Plenel (Mediapart) et Odile Marquant (Reporters sans frontières), ils ont échangé sur la liberté de la presse à l’heure des médias numériques. Cette rencontre a été organisée à l’initiative du CLEMI-Créteil et de la Fédération française des clubs Unesco.

La liberté de la presse l’heure des médias numériques

En 1991, à l’initiative de l’UNESCO et du département de l’information de l’ONU, s’est tenue une conférence à Windhoek en Namibie à l’issue de laquelle est née la journée mondiale de la liberté de la presse. Vingt ans après, le paysage médiatique a considérablement changé avec l’émergence des médias numériques. Internet a permis d’accroître la capacité des individus à communiquer, s’exprimer, s’informer et à diffuser de l’information. Les révolutions en cours dans les pays au Sud et à l’Est de la Méditerranée, montrent le rôle des médias numériques dans les progrès de la démocratie.

Des jeunes venus de Bobigny, Bondy, Créteil mais également de Paris se sont retrouvés à l’UNESCO, le mardi 3 mai, à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse pour rencontrer des journalistes et des représentants d’association, réfléchir et échanger sur la liberté de la presse aujourd’hui et ses enjeux.

La rencontre était animée par Olivier Bourhis , délégué général de l’association Jets d’encre. Ce dernier a rappelé que la liberté d’expression et d’information héritées de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, étaient des acquis récents et toujours fragiles. En France, il faut attendre la loi du 29 juillet 1881 pour que se développe une presse libre et indépendante qui disparaît pendant l’occupation pour renaître à la Libération. Une liberté qui est loin d’être garantie partout dans le monde aujourd’hui.

« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. » Art. 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948).

A l’heure d’Internet et de la téléphonie mobile, le droit à la diffusion et à la recherche d’informations « sans considérations de frontières » et « par quelque moyen que ce soit » est plus que jamais d’actualité.

Ziad Maalouf, journaliste à Radio France Internationale, spécialiste des médias et des nouvelles technologies a ensuite pris la parole devant les élèves. Il est en charge de l’émission l’Atelier des médias, une web- émission participative qui s’appuie sur des échanges permanents avec les auditeurs via les réseaux sociaux et se double d’un blog dont les rédacteurs sont des auditeurs des quatre coins de la planète, le MONDOblog. Ce jeune journaliste a rappelé qu’avec le Web désormais, en plus d’être des récepteurs, nous sommes tous des médias-c’est à dire des diffuseurs d’informations. Tous médias mais pas tous journalistes. Il a en effet insisté sur le fait que toute information doit être vérifiée. C’est la tâche des journalistes.

Si Internet favorise la liberté d’expression et d’information, il n’échappe pas à la censure. La situation en Tunisie hier, en Syrie, en Libye ou encore en Chine aujourd’hui, montre comment les autorités s’efforcent de contrôler les flux d’information sur la Toile, allant jusqu’à arrêter et parfois à éliminer physiquement des cyberdissidents. La censure sur le Net a transformé les Tunisiens en experts de la Toile selon Ziad Maalouf. La police du web à l’époque du président Ben Ali était surnommée « Amar 404 ». Les sites et blogs censurés étaient inaccessibles et remplacés par un message « 404 Not found ». C’est pour contourner cette censure que les Tunisiens sont devenus des experts de l’usage de serveurs proxy. Le fait d’être tous des émetteurs potentiels d’informations sur le Net nous rend tous responsables de ce que l’on y diffuse a rappelé Ziad Maalouf, à son auditoire très familier des réseaux sociaux.

Edwy Plenel, journaliste, président et directeur de publication du site d’information Mediapart s’est à son tour adressé aux élèves pour expliquer l’importance de la liberté d’informer et la nécessité du journalisme d’investigation. Se référant à Albert Camus, et citant l’éditorial signé par l’écrivain et journaliste dans l’édition de Combat du 31 août 1944, qui affirmait vouloir « élever ce pays en élevant son langage", Plenel a parlé avec conviction de sa conception du journalisme qui selon lui doit être exigeant, rigoureux et indépendant. Le journalisme n’a de raison d’être que par sa légitimité démocratique. Le droit à l’information est avant tout un droit des citoyens, a–t-il déclaré. L’affaire des projets de « quotas ethniques » dans le recrutement des centres de formation de joueurs de football, tout récemment révélée par Médiapart a fait l’objet de questions dans l’auditoire.

 

UNESCO 3 mai 2011

Réunis à l’UNESCO à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse pour une rencontre avec des élèves, (de gauche à droite) : Ziad Maalouf (RFI), Edwy Plenel (Mediapart), Olivier Bourhis (Jets d’encre), animateur de la rencontre et Odile Marquant (RSF). Photo : EG-CLEMI-Créteil.


Comment agir pour la liberté de la presse ?

Ce dernier thème a permis aux participants d’aborder plus concrètement la question de l’engagement en faveur de la défense de la liberté de la presse et des médias. Odile Marquant, membre du conseil d’administration de Reporters sans frontières a exposé l’action de l’association internationale. Comme chaque année à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, RSF publie en ligne la liste des chefs d’Etat ou chefs de guerre sèment la terreur parmi les journalistes. La carte de la liberté de la presse dans le monde en 2011 montre que dans de nombreuses régions du monde, particulièrement dans les pays où sévit une dictature et dans les zones de conflit, les journalistes sont menacés dans l’exercice de leur métier. Le nombre de journalistes pris en otages est en augmentation.

De même, la cyber répression augmente à l’encontre de citoyens qui utilisent le net pour s’exprimer et informer dans des pays non démocratiques.

L’émergence des nouveaux médias pose la question de savoir qui doit être protégé. En effet, si une association telle que RSF est née pour venir en aide aux journalistes censurés et menacés dans l’exercice de leur métier, aujourd’hui elle est amenée à soutenir et protéger des bloggers qui ne sont nécessairement des journalistes.

Odile Marquant a également salué l’action de la Maison des journalistes à Paris, un lieu unique au monde où sont accueillis des journalistes contraints de fuir leur pays.

L’engagement en faveur de la liberté de la presse et des médias, c’est ce dont sont venus témoigner les étudiants de l’IPJ (Institut Pratique du Journalisme de Paris). Ces étudiants ont présenté une saynète intitulée « Sang d’encre » écrite et jouée par eux pour l’édition 2011 d’ApprentiScène, Avec force et émotion, ces futurs journalistes, par ce court spectacle, très applaudi, ont dénoncé les pressions et les violences dont est victime leur profession à travers le monde.

C’est à Olivier Bourhis de Jets d’encre qu’est revenue la mission de conclure cette rencontre. Il a invité les élèves à mieux connaître leurs droits et obligations en matière d’expression et de publication dans les établissements. En effet, 2011 marque aussi le vingtième anniversaire des droits de publication des lycéens en France (voir le site de 20 Piges !) . Le délégué général de l’association de la promotion de la presse jeune a ainsi pu encourager les élèves présents à prendre la parole en créant un journal dans leur lycée, pour ainsi apprendre à exercer en toute responsabilité leur droit d’expression et de publication.

La liberté de la presse est une cause à défendre chaque jour comme l’ont rappelé tous les participants qui n’ont pas manqué, à plusieurs reprises, de rendre hommage aux journalistes de France télévision et à leurs accompagnateurs, otages en Afghanistan depuis 490 jours.

 

Les échanges ont pu se prolonger, en fin d’après-midi, autour d’un buffet offert par l’UNESCO. Merci à l’équipe de la Fédération française des clubs Unesco et l’UNESCO pour avoir contribué à la réussite de cette rencontre.

 

Rendez-vous est donné aux élèves et enseignants de l’académie, l’an prochain, avec l’espoir de pouvoir ensemble se féliciter des progrès de la liberté de la presse et de la démocratie, le 3 mai 2012.

 

E. Gautier